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Des travailleurs humanitaires ont été tués à Gaza

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2 avril 2024
La Presse Canadienne, 2024
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Par La Presse Canadienne, 2024

DAYR AL BALAḨ, Palestine — Le premier ministre israélien Benjamin Nétanyahou a reconnu que les forces israéliennes ont mené la frappe qui a tué sept travailleurs humanitaires à Gaza, dont un Canadien.

Dans un communiqué publié mardi, il a déclaré : «Malheureusement, au cours de la journée écoulée, un incident tragique s'est produit, à savoir une frappe involontaire de nos forces sur des innocents dans la bande de Gaza.»

Il a ajouté que les autorités «vérifient minutieusement» et «feront tout pour que cela ne se reproduise pas».

La frappe de lundi dernier a tué sept travailleurs humanitaires de la World Central Kitchen, ce qui a conduit l'organisation caritative à suspendre ses opérations dans la bande de Gaza.

Chypre, qui a joué un rôle clé dans la mise en place d'une route maritime pour acheminer de la nourriture vers le territoire, a déclaré que les navires arrivés récemment faisaient demi-tour, avec quelque 240 tonnes d'aide non livrée.

L'origine des tirs n'a pas pu être confirmée de manière indépendante. L'armée israélienne a exprimé sa «sincère tristesse» pour ces morts, sans pour autant en assumer la responsabilité.

Des images ont montré les corps, dont plusieurs portaient des équipements de protection portant le logo de l'organisation caritative, dans un hôpital de la ville de Deir al-Balah, dans le centre de Gaza. Parmi les personnes tuées figurent un Canadien possédant la double nationalité, trois ressortissants britanniques, un Australien, un Polonais, un Américain et un Palestinien, selon les registres de l'hôpital.

World Central Kitchen, une organisation caritative fondée par le célèbre chef José Andrés, a joué un rôle clé dans l'ouverture récente de la route maritime, qui a donné un peu d'espoir au nord de Gaza, où, selon les Nations unies, une grande partie de la population est au bord de la famine, coupée du reste du territoire par les forces israéliennes. 

M. Andrés, dont l'organisation caritative opère dans plusieurs pays ravagés par des guerres ou des catastrophes naturelles, y compris en Israël après l'attaque du 7 octobre qui a déclenché le conflit actuel, s'est dit «bouleversé» par la mort de ses collègues.

«Le gouvernement israélien doit mettre fin à ce massacre aveugle. Il doit cesser de restreindre l'aide humanitaire, de tuer des civils et des travailleurs humanitaires et d'utiliser la nourriture comme une arme», a-t-il écrit sur X, anciennement Twitter.

L'organisation caritative a indiqué que l'équipe se déplaçait dans un convoi de trois voitures, dont deux véhicules blindés, et que ses déplacements avaient été coordonnés avec l'armée israélienne.

Le contre-amiral Daniel Hagari, principal porte-parole de l'armée, a déclaré que les responsables avaient «examiné l'incident au plus haut niveau». Il a ajouté qu'une enquête indépendante sera lancée afin de «nous aider à réduire le risque qu'un tel événement ne se reproduise».

Erin Gore, PDG de l'organisation caritative, a dit que «ce n'est pas seulement une attaque contre WCK, c'est une attaque contre les organisations humanitaires qui interviennent dans les situations les plus difficiles où la nourriture est utilisée comme arme de guerre. C'est impardonnable».

L'UNRWA, la principale agence de l'ONU à Gaza, a déclaré dans son dernier rapport que 173 de ses employés ont été tués dans le territoire depuis le début de la guerre. 

Les militants du Hamas ont fait irruption dans le sud d'Israël lors d'une attaque surprise le 7 octobre, tuant quelque 1200 personnes et enlevant environ 250 otages. Israël a répondu par l'une des offensives les plus meurtrières et les plus destructrices de l'histoire récente.

Face à l'aggravation de la catastrophe humanitaire dans le nord de Gaza, plusieurs pays ont œuvré à l'ouverture d'une voie maritime, dans l'espoir de permettre à davantage d'aide d'entrer dans le territoire, où les approvisionnements n'ont été acheminés qu'au compte-gouttes par les voies terrestres contrôlées par Israël. Les États-Unis et d'autres pays ont également largué de l'aide par avion, mais les travailleurs humanitaires affirment que ces efforts sont loin d'être suffisants pour répondre aux besoins croissants.

Israël a interdit à l'UNRWA d'effectuer des livraisons dans le nord, et d'autres groupes humanitaires affirment qu'il est trop dangereux d'envoyer des convois de camions dans le nord en raison de l'incapacité de l'armée à garantir un passage sûr.

Trois navires d'aide en provenance de l'île méditerranéenne de Chypre sont arrivés plus tôt lundi, transportant quelque 400 tonnes de nourriture et de fournitures organisées par World Central Kitchen et les Émirats arabes unis à la suite d'une opération pilote menée le mois dernier.

Le porte-parole du ministère chypriote des Affaires étrangères, Theodoros Gotsis, a indiqué mardi qu'environ cent tonnes d'aide avaient été déchargées avant que l'organisation caritative ne suspende ses activités, et que les 240 tonnes d'aide restantes seraient ramenées à Chypre.

Les corps des travailleurs humanitaires ont été transportés dans un hôpital de la ville de Rafah, dans le sud du pays, à la frontière égyptienne, selon un journaliste de l'Associated Press présent à l'hôpital.

Les États-Unis, le Royaume-Uni, la Pologne et l'Australie, dont les ressortissants auraient été tués, ont demandé une enquête ou une explication de la part d'Israël et ont exprimé leur consternation.

Au moins 32 916 Palestiniens ont été tués au cours de la guerre, dont environ deux tiers de femmes et d'enfants, selon le ministère de la Santé de Gaza, qui ne fait pas de distinction entre les civils et les combattants dans son décompte. Israël impute le nombre de civils aux militants palestiniens parce qu'ils combattent dans des zones résidentielles denses, mais l'armée commente rarement les frappes individuelles.

Deux autres frappes israéliennes apparentes ont tué au moins 12 Palestiniens, dont cinq enfants, à Rafah, où Israël a promis d'étendre ses opérations terrestres malgré la présence de quelque 1,4 million de Palestiniens, dont la plupart ont cherché à fuir les combats ailleurs. 

L'une des frappes a touché la maison d'une famille, et un père et ses trois enfants, âgés de 7, 13 et 19 ans, figurent parmi les victimes, selon les registres de l'hôpital. Une autre frappe a touché un rassemblement près d'une mosquée, tuant au moins six personnes, dont trois enfants. 

Les organisations humanitaires ont appelé à plusieurs reprises à un cessez-le-feu humanitaire, affirmant que c'était le seul moyen d'atteindre les personnes dans le besoin. Les États-Unis, le Qatar et l'Égypte ont passé des mois à essayer de négocier une telle pause et une libération d'otages, mais les pourparlers indirects entre Israël et le Hamas restent enlisés.

Le Hamas détiendrait une centaine d'otages et les dépouilles de 30 autres, après avoir libéré la plupart des autres lors d'un cessez-le-feu en novembre, en échange de la libération de Palestiniens emprisonnés par Israël.

Wafaa Shurafa et Samy Magdy, The Associated Press