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Le ministre Miller travaille sur un programme de régularisation de sans-papiers

durée 16h48
19 avril 2024
La Presse Canadienne, 2024
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Temps de lecture   :  

4 minutes

Par La Presse Canadienne, 2024

MONTRÉAL — Un programme de régularisation de sans-papiers est toujours dans les plans du gouvernement fédéral, a indiqué le ministre de l’Immigration, Marc Miller, vendredi, en marge d’une conférence à Montréal où il a été interrompu à plusieurs reprises par des manifestantes en soutien aux Palestiniens, qui accusent le ministre d'être «un tueur d'enfants».

Questionné sur la possibilité d’annoncer, d’ici la fin de l’année, un programme qui permettrait de régulariser des sans-papiers, le ministre a répondu «qu’il l’espère bien» et qu’il «continue de travailler là-dessus».

Marc Miller a indiqué qu’il souhaite mettre sur pied un «programme ambitieux», en admettant toutefois qu’au sein même du Parti libéral, les avis divergent à ce sujet.

«Je dirais que même à l'interne de notre parti, ce n'est pas nécessairement tout le monde qui est là» et «au sein du Parlement également, il y a plusieurs points de vue, puis je pense qu'il faut les respecter», a expliqué le ministre vendredi midi, lors d’un point de presse après un événement organisé par le Conseil des relations internationales de Montréal (CORIM).

«On parle de gens qui sont ici, qui devraient avoir droit à l'accès à la citoyenneté canadienne, à la résidence permanente et qui ne l’ont pas pour une raison ou une autre», a expliqué le ministre en précisant que le programme s’adresserait à des gens qui ont déjà un hébergement et un travail.

«Je ne veux pas que ça soit sectoriel. C'est clair qu'il y a peut-être certains secteurs où on pourrait privilégier la régularisation de gens, je pense notamment à la construction, au milieu de la santé» et «je pense aussi aux gens qui sont d'expression francophone, qui pourraient s'établir dans des régions hors du Québec, mais aussi au Québec, si le Québec le veut bien», a ajouté le ministre Miller.

En novembre 2021, le premier ministre Justin Trudeau avait mandaté son ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté, Sean Fraser, de trouver une solution pour les personnes sans statut officiel qui vivent au pays.

Ce programme se fait toujours attendre par différents groupes comme le mouvement Solidarité sans frontières.

Ceux-ci dénoncent qu’un vide juridique empêche plusieurs sans-papiers d’avoir accès à de nombreux services comme des soins de santé, des cours de francisation, des permis de travail vers des emplois bien rémunérés ou de l’aide financière de dernier recours.

Mais le ministre Miller a tenu à préciser que certains groupes de pression seront déçus, car il n’y aura pas de régularisation massive des sans-papiers.

«C'est clair que ce ne sera pas pour tout le monde» et certains groupes «ne seront pas contents», mais «il faut réaliser qu’au Canada, il y a des gens qui sont ici et qui devraient être Canadiens et il faut trouver une voie de régularisation qui n’est pas sans paramètre et qui n’est pas sans frais non plus».

Interruption: «Vous êtes un tueur d'enfants!» 

Lors d’un discours qui a précédé le point de presse, le ministre a été interrompu quatre fois par des manifestantes en soutien aux Palestiniens.

Les quatre femmes s’étaient faufilées parmi les invités du déjeuner du CORIM dans une salle de l’hôtel Le Reine Elizabeth.

Parmi elles, il y avait Samar Alkhdour, dont la fille de 13 ans est morte à Gaza il y a quelques mois.

«Vous n’avez pas de cœur, vous êtes un tueur d’enfants!» a lancé la femme avant d’être escortée à l’extérieur par la sécurité.

La Presse Canadienne s’était entretenue avec cette femme de 38 ans en février dernier.

Elle travaille dans un centre d’aide aux immigrants à Montréal et elle est arrivée au Québec en tant que demandeuse d’asile en 2019.

Sa fille n’avait pas pu faire le voyage au Canada à l’époque. Elle était restée avec des membres de sa famille à Gaza, en raison de problèmes de santé.

Le but de Samar Alkhdour était de faire venir sa fille une fois qu’elle obtiendrait la résidence permanente.

Mais la guerre est arrivée à Gaza et Samar Alkhdour a tenté de la faire évacuer d’urgence, sans succès.

Sa fille Jana a été retrouvée morte en raison de malnutrition, selon sa mère, dans une église qui servait de refuge, le 8 janvier dernier. Quatre jours après son 13e anniversaire.

Depuis, elle tente en vain de faire venir au pays le reste de sa famille et dénonce la lenteur dans l’émission de visas aux proches de Canadiens qui tentent de fuir la guerre en Palestine.

Samar Alkhdour manifeste régulièrement devant les bureaux de Marc Miller à Montréal et le ministre connaît la triste histoire de la femme qui l’a vilipendé devant des centaines de convives médusés vendredi.

«C'est un dossier dont je ne peux pas parler publiquement. On a déployé beaucoup d'efforts pour sortir sa fille qui est morte de faim à Gaza. C'est malheureux, mais ça ne veut pas dire que les efforts n'ont pas été déployés», a indiqué le ministre à La Presse Canadienne.

Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada a créé un programme visant à offrir des visas temporaires aux personnes coincées dans le territoire palestinien assiégé, à condition que des proches puissent les soutenir ensuite au Canada.

Cette politique stipule qu’elle n’examinera que 1000 demandes, mais le ministre compte bonifier ce nombre.

Les personnes dont les demandes sont «acceptées en traitement» doivent faire l’objet de vérifications à des fins de sécurité.

En absence de personnel dans cette zone de guerre, le gouvernement fédéral doit effectuer des enquêtes à distance, en se fiant notamment au gouvernement israélien.

Les Palestiniens qui comptent fuir la guerre pour trouver refuge au Canada doivent passer par l’Égypte.

«C’est le ministre de la Défense israélien qui contrôle cette issue. Donc ce n'est pas facile et évidemment, ça prend du temps», a souligné le ministre de l’Immigration.

En réaction aux femmes qui l'avaient interrompu lors de son discours, le ministre a indiqué que «la mort de gens à Gaza devrait tous nous hanter» et que «dans cette histoire très difficile où beaucoup de personnes souffrent, il y a beaucoup de problèmes et il n'y a pas de façon facile de les régler».

Stéphane Blais, La Presse Canadienne