C-5: des juristes poursuivent le gouvernement fédéral


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Par La Presse Canadienne, 2025
MONTRÉAL — Le Centre québécois du droit de l’environnement (CQDE) affirme avoir déposé jeudi matin un recours devant la Cour supérieure du Québec afin de contester la validité de la loi C-5 du gouvernement Carney.
Cette loi fédérale, adoptée en juin dernier, «confère des pouvoirs démesurés au gouvernement et met en péril à la fois la démocratie et la protection de l’environnement», selon le CQDE, un organisme de bienfaisance formé de juristes.
«La loi C-5 donne des pouvoirs démesurés au gouvernement fédéral, au point où la population et les tribunaux perdent leur capacité de contrôler les décisions gouvernementales et ça, en démocratie, c'est un contrepoids essentiel» protégé par la Constitution, a fait valoir Geneviève Paul, directrice générale du CQDE, en entrevue avec La Presse Canadienne.
Avec la loi C-5, le premier ministre Mark Carney veut accélérer la réalisation de projets industriels considérés par Ottawa comme étant «d’intérêt national», tels que des mines, des ports et des pipelines avec l’objectif de limiter les délais d’approbation à deux ans.
«On se retrouve avec des projets qui sont décidés à l'avance, avant que les impacts soient pleinement considérés» et «en plus, ça permet au gouvernement d’écarter l’application de lois environnementales», qu’elles soient fédérales ou provinciales, a expliqué Geneviève Paul.
«On parle quand même de projets avec de possibles lourds impacts, donc avec des impacts qui peuvent être irréversibles sur nos écosystèmes, sur l'eau, sur l'air», a ajouté la juriste.
Ces «pouvoirs non balisés» ouvrent la porte à «des décisions arbitraires, à un empiétement sur les compétences des provinces prévues par la Constitution et à une réduction du rôle de surveillance des tribunaux», selon le CQDE.
Une réponse à la guerre commerciale
Le gouvernement Carney a fait adopter le projet de loi C-5 afin de répondre à la détérioration des relations entre le Canada et les États-Unis et faire face à la guerre commerciale menée par le gouvernement Trump.
«Les impacts sociaux et économiques des tarifs douaniers sont indéniables, mais nul besoin de sacrifier des normes environnementales pour accélérer la réalisation de projets: c’est contre-productif et ça met en péril les droits de la population», selon le CQDE qui fait valoir que, pour que des projets bénéficient à l’ensemble de la population, ils «doivent être réellement ancrés dans la transition et dans le respect des lois environnementales».
Éviter «une pluie de recours»
Le gouvernement libéral dévoilera jeudi une première série de grands projets d'infrastructure qu'Ottawa veut approuver de façon accélérée.
Selon le CQDE, il n'est pas exclu qu'Ottawa doive également faire face à d'autres recours contre des projets en particulier.
«Je ne parle pas nécessairement du CQDE», mais «ce n'est certainement pas à exclure», a expliqué Geneviève Paul.
La juriste a précisé que son organisme «espère que les tribunaux puissent se prononcer dès que possible pour économiser une pluie de recours qu'il pourrait y avoir contre les décisions sur des projets particuliers».
Des Premières Nations contestent aussi C-5
Le Centre québécois du droit de l’environnement demande aux tribunaux d’invalider la loi C-5, de la même façon que l’ont fait certaines Premières Nations.
Neuf Premières Nations de l’Ontario ont en effet demandé à la Cour supérieure de justice de l’Ontario de déclarer inconstitutionnelle la loi C-5.
Elles font notamment valoir que cette loi, ainsi que la loi ontarienne nommée loi 5, représentent un «danger clair et présent» pour le droit des Premières Nations à l’autodétermination quant à leurs modes de vie sur leurs territoires.
Stéphane Blais, La Presse Canadienne