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Cryptoactifs: quand c'est trop beau pour être vrai, ça l'est, suppose l'AMF

durée 06h00
1 mars 2023
La Presse Canadienne, 2023
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Temps de lecture   :  

4 minutes

Par La Presse Canadienne, 2023

MONTRÉAL — Il est déjà parfois difficile de récupérer son dû lorsqu'on se fait flouer dans la vraie vie. Imaginez quand une arnaque est commise dans le monde virtuel dans un anonymat quasi total. 

Dans le cadre du Mois de la prévention de la fraude, qui débute ce mercredi, l'Autorité des marchés financiers (AMF) met en garde contre les fraudes liées aux cryptoactifs, qui continuent d'attirer «un large éventail d'investisseurs dans un univers numérique qui n'a pas de frontière», et ce, en dépit de leur valeur spéculative et excessivement fébrile.

En 2021, les sommes subtilisées dans le cadre de fraudes liées aux cryptomonnaies totalisaient 75 millions $ au pays, selon des données du Centre antifraude du Canada. Pour les trois années précédentes, les pertes signalées s'élevaient plutôt à 12,6 millions $ annuellement.

Contrairement à d'autres produits financiers et spéculatifs traditionnels, la cryptomonnaie est un produit numérique qui n'a aucune valeur dans le monde réel. Elle est toutefois utilisée pour réaliser des transactions en ligne, et ce, parfois en toute légalité, nuance Hélène Guilbault, enquêtrice spécialisée dans les cryptoactifs à l'AMF.

«Il y a des transactions légitimes, ce n'est pas illégal d'investir dans les cryptoactifs», relève-t-elle en entrevue avec La Presse Canadienne.

Mme Guilbault recommande toutefois d'user de prudence en se référant notamment à la liste des plateformes enregistrées sur son site internet ou sur les autres autorités provinciales. «Ça permet de mitiger les risques, parce que pour ces entreprises-là, il y a des contrôles en place», explique-t-elle.

La vigilance est d'ailleurs le premier rempart contre la fraude en ligne, ajoute l'enquêtrice, qui recommande de bien s'informer avant d'investir. 

«Il faut arrêter de parler de finances avec des inconnus, même si la personne semble professionnelle, que le site internet semble crédible», indique-t-elle. 

Parmi les drapeaux rouges à observer, l'AMF indique la difficulté de savoir qui se trouve derrière la plateforme et où ces individus se trouvent dans le monde. «Il y a des fraudeurs au Québec, mais il y en a encore plus à l'international, dans des pays où on retrouve des paradis fiscaux. Pour des investisseurs floués, ça rend encore plus difficile la tentative de récupérer leurs billes.»

La perspective de rendements élevés et rapides est aussi un signe qui devrait allumer un voyant rouge. «Quand ça semble trop beau pour être vrai, ça l'est probablement, prévient Mme Guilbault. On a vu des cas d'investisseurs qui avaient accès à leurs comptes, tout semblait légitime, ils voyaient même leurs rendements, mais finalement il n'y avait aucune cryptomonnaie, c'était juste de l'air.»

Multiples stratégies, même objectif

Les fraudeurs rivalisent d'ingéniosité pour arnaquer leurs victimes, indiquent aussi bien l'AMF que la GRC et le Centre antifraude du Canada. 

Ils peuvent se faire passer pour un fonctionnaire du gouvernement pour réclamer des acomptes provisionnels ou bien pour une entreprise organisant un concours pour lequel on ne peut réclamer un prix qu'en envoyant de l'argent. 

Les arnaques amoureuses ou de type grand-parent peuvent aussi avoir recours à la cryptomonnaie. C'est aussi le cas d'un individu qui propose une occasion d'affaires inouïe, mais qui mise beaucoup sur le caractère urgent et rapide de l'investissement pour profiter de l'aubaine.

S'il ne demande pas directement de l'argent à sa victime, le fraudeur peut tenter d'obtenir ses renseignements personnels pour prendre le contrôle de ses comptes bancaires et ensuite utiliser les fonds qui s'y trouvent pour se payer en cryptomonnaies.

Les fraudeurs peuvent aussi approcher des proies potentielles sur des sites de petites annonces ou de vente et leur offrir de payer leurs achats en cryptomonnaie. Une fois la transaction complétée, le service ou le produit offert n'est jamais livré.

Enfin, les fraudes liées aux cryptoactifs peuvent aussi miser sur un réseau d'investisseurs à qui on fait miroiter d'alléchantes primes de recrutement, illustre Mme Guilbault. 

«On a déjà eu des parents qui ont appelé parce que leur jeune était tombé dans une fraude de cryptomonnaie, illustre-t-elle. Mais souvent, on remarque que les gens qui font de l'argent parlent du réseau alors que ceux qui en perdent en parlent moins [par honte], ce qui donne l'impression que c'est plus légitime.»

S'informer pour ne pas être floué

L'AMF suggère aux investisseurs tentés par l'aventure de la cryptomonnaie de s'informer de la même manière qu'ils le feraient pour  d'autres produits financiers. En ce sens, l'AMF a mis sur son site internet de la documentation et différents outils à la disposition du public.

Mme Guilbault insiste sur le fait de ne pas céder à la pression ou au sentiment d'urgence qui peut faire craindre de rater une opportunité, un point faible sur lequel insistent les fraudeurs.

Les personnes étant victimes d'une fraude à la cryptomonnaie sont invitées à communiquer avec l'AMF, leur service de police local ou le Centre antifraude du Canada.

Enfin, Revenu Québec rappelle que comme avec le véritable argent les gains en cryptomonnaie, comme les pertes, doivent être déclarés. 

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Cette dépêche a été rédigée avec l'aide financière de la Bourse de Meta et de La Presse Canadienne pour les nouvelles.

Marie-Ève Martel, La Presse Canadienne