Ottawa trop lent à traiter les demandes de statut de Première Nation, selon la VG


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Par La Presse Canadienne, 2024
OTTAWA — La vérificatrice générale du Canada affirme que Services aux Autochtones Canada n'a pas traité les demandes d'inscription en vertu de la Loi sur les Indiens dans le délai requis de six mois, privant ainsi de nombreux membres des Premières Nations d'accès au logement dans les réserves, d'aide financière pour les études postsecondaires et de prestations de santé.
Dans un rapport d'audit publié mardi, Karen Hogan a constaté que plus de huit demandes sur dix traitées par le ministère dépassaient la norme de service de six mois. Parmi celles-ci, il y avait des demandes prioritaires pour des personnes âgées ou ayant des problèmes de santé.
Après avoir examiné un échantillon de 140 000 demandes soumises entre avril 2019 et mars 2024, Mme Hogan a conclu qu'il fallait en moyenne près de 16 mois au ministère pour prendre une décision sur une demande individuelle et près de trois ans pour traiter les appels.
Mme Hogan a également constaté un arriéré de près de 12 000 demandes, dont 1500 dataient de plus de deux ans.
«Il est important que Services aux Autochtones Canada prenne des décisions appropriées en temps opportun concernant l’octroi ou le refus du statut d’Indien afin que le programme d’inscription soutienne les droits des personnes qui le demandent», peut-on lire dans le rapport.
La Loi sur les Indiens est une loi controversée, promulguée en 1876, qui détermine l'admissibilité au statut d'Indien des Premières Nations. Elle ne couvre pas le statut de Métis ni celui d'Inuit.
Un processus complexe
Au fil des ans, Ottawa et les Premières Nations ont travaillé à l'élimination de certaines discriminations fondées sur le sexe contenues dans la Loi, notamment une règle qui empêche certaines femmes des Premières Nations de transmettre leur statut à leurs enfants après avoir épousé un homme non inscrit.
«Le processus d’inscription peut être complexe et souvent déroutant pour les personnes qui souhaitent soumettre une demande d’inscription, mettre à jour leurs renseignements ou faire reconnaître leur ascendance des Premières Nations», souligne le rapport.
«Il est donc essentiel que les personnes qui souhaitent suivre efficacement le processus d’inscription en comprennent clairement le fonctionnement et qu’elles soient informées des modifications apportées à la Loi sur les Indiens qui pourraient les rendre admissibles à l’inscription.»
De plus, Mme Hogan a constaté que Services aux Autochtones Canada «n’avait pas pu démontrer que la plupart des personnes chargées de rendre les décisions finales par rapport aux demandes avaient la formation et l’accréditation nécessaires» et a déclaré que le ministère n'assurait pas la surveillance de ses bureaux régionaux.
Le rapport indique également que Services aux Autochtones Canada n'avait aucune norme de service concernant le délai d'examen des appels et qu'il fallait en moyenne plus de trois ans pour déterminer leur validité.
«Nous sommes préoccupés par le fait que des personnes attendent de nombreuses années avant de savoir si elles ont droit d’obtenir le statut d’Indien et sont admissibles aux avantages qui en découlent.»
Mme Hogan a recommandé que Services aux Autochtones Canada «définisse clairement et publiquement ses normes de service» et rende compte chaque année du respect de ces normes. Le ministère a souscrit à sa recommandation.
Le budget sous-financé
Bien que le processus d'inscription des Premières Nations soit transféré ultérieurement aux communautés des Premières Nations, Mme Horgan a conclu que le budget de traitement est sous-financé depuis trois décennies.
Mme Hogan a constaté que les centres de traitement communautaires sont financés selon une formule qui n'a pas changé depuis 1994. Ils reçoivent environ 7 $ pour chaque membre des Premières Nations et 15 $ pour chaque transaction effectuée par un administrateur.
Services aux Autochtones a déclaré que le modèle de financement équivaut à soutenir un administrateur une journée par semaine à 12,80 $ l'heure, soit un montant inférieur au salaire minimum dans toutes les provinces et tous les territoires.
Mme Hogan a déclaré que l'absence de financement stable oblige les Premières Nations à soumettre de nouvelles propositions budgétaires chaque année.
Des travaux déjà en cours
La ministre des Services aux Autochtones, Mandy Gull-Masty, a déclaré dans un communiqué de presse qu'elle «accueillait favorablement» le rapport de Mme Hogan et qu'elle le qualifiait d'outil constructif et précieux pour améliorer le processus d'inscription.
«Bien que la vérification mette en évidence des domaines à améliorer, je tiens à souligner que des travaux importants sont déjà en cours dans bon nombre des domaines identifiés», a-t-elle soutenu.
«Services aux Autochtones Canada travaille en partenariat avec les communautés des Premières Nations afin de garantir que les services d'inscription sont fournis avec intégrité, respect et en mettant l'accent sur le service à la clientèle.»
Alessia Passafiume, La Presse Canadienne